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Sécurité et lutte contre la délinquance : Il faut adapter notre droit.



À Orléans, nous avons prouvé qu’il était possible pour une équipe municipale de contribuer, dans le cadre de ses compétences, à juguler l’insécurité et à obtenir des résultats significatifs et s’inscrivant dans la durée.


Mais, une mairie seule ne peut pas tout dans ce domaine régalien. Il convient de réarmer l’Etat, de lui donner à nouveau la pleine possession de prérogatives auxquelles il a renoncé de lui-même. On l’a dit, dans de précédentes chroniques, l’augmentation des moyens humains, matériels et financiers est essentielle. Mais il faut aussi, et l’on en parle moins, se doter des moyens juridiques sans lesquels toutes les meilleures intentions du monde seront vouées à l’échec.


Or, aujourd’hui, nous ne disposons qu’imparfaitement de ces moyens juridiques. Le droit européen comme le droit national, ne permettent pas ou mal, de mettre en œuvre, les actions nécessaires pour lutter efficacementcontre toutes les formes de délinquance.


Au niveau du droit européen.

En cette période de pré-campagne présidentielle, chacun rivalise de fermeté : certains veulent un moratoire de plusieurs années sur l’immigration en Europe, d’autres veulent consulter les Français par référendum sur la politique migratoire, d’autres enfin veulent rétablir le délit de séjour irrégulier. Pour ma part, je préfère le sérieux à la démagogie et je pose une question préalable : la mise en œuvre de ces mesures est-elle possible en l’état actuel du droit ? La réponse est non.


La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme interdit l’expulsion d’un étranger, si dangereux soit-il, s’il est exposé, dans son pays d’origine à de mauvais traitements (Arrêt Daoudi du 3 décembre 2009). La Cour de justice de l’Union européenne écarte tout traitement pénal de l’irrégularité du séjour, qu’il s’agisse du placement en garde à vue (arrêt Achughbabian, 6 décembre 2011) ou des peines d’emprisonnement (arrêt El Dridi, 28 avril 2011).

Enfin, si une loi plus dure relative à la politique migratoire devait être adoptée par référendum, il faut rappeler que si cette loi était contraire aux traités européens, le juge national aurait l’obligation de l’écarter, au profit des textes européens (arrêt Simmenthal de la cour de justice de l’Union européenne, 9 mars 1978 ; arrêt Nicolo du Conseil d’Etat du 20 octobre 1989).

On le voit, la mise en œuvre du simple principe : un étranger délinquant n’a plus sa place en France, ne peut que très difficilement être mis en œuvre.


50% de la délinquance seraient le fait de 5% de multirécidivistes.

Aussi, pour éloigner les délinquants étrangers, il faut d’abord s’en donner les moyens : la France doit se retirer de la Convention européenne des droits de l’homme et mettre l’Union européenne en demeure de changer directives et règlements relatifs à l’immigration.


Au niveau du droit national.

Contrairement à beaucoup d’idées communément admises, notre droit pénal fonctionne et la Justice n’est pas cet océan de laxisme que certains se plaisent facilement à dénoncer. Pour autant, plusieurs problèmes précis se posent et appellent des réponses juridiques également précises. Bref, il y a des trous dans la raquette et il faut les traiter.


La multi-récidive. Elle est une bonne partie du problème et nous empoisonne la vie. 50% de la délinquance seraient le fait de 5% de multirécidivistes.


Les agressions contre les forces de l’ordre.

Une grande majorité de Français est indigné par la multiplication des comportements de ce type.

Il faudra créer un délit spécifique en cas d’agression commise contre des agents publics et en particulier contre les forces de l’ordre. Les « violences urbaines », qui désignent en réalité des agressions perpétrées par des groupes de jeunes voyous contre les représentants de la police nationale, et plus généralement, contre ceux qui incarnent une institution publique, doivent faire l’objet d’un traitement spécifique.

Il faut ici introduire des peines minimales automatiques, que les juges devront infliger dans certains cas de récidive et dans les cas d’agressions d’agents du service public.


Il est possible que le Conseil constitutionnel s’y oppose : Il faudra alors consulter les Français par référendum. La cour suprême en France, c’est le peuple : c’est au peuple français et à lui seul qu’il appartient de trancher cette question pour permettre à l’Etat de mieux protéger ceux qui nous protègent.


Le rappel à la loi.

Il convient d’affirmer un autre principe fort : tout comportement délictueux ou criminel mérite une vraie sanction. C’est l’application du principe impunité 0.


Cela semble aller de soi, mais il faut savoir qu’en 2019, dans des cas où les infractions sont caractérisées, les parquets ont prononcé 262 346 rappels à la loi. Or, le rappel à la loi est une décision qui ne constitue pas une condamnation et qui n’est pas inscrite au casier judiciaire. Dans 56% des cas, les parquets ont choisi cette mesure alternative à l’incarcération et au détriment d’autres solutions pourtant plus probantes (travaux d’intérêt général, interdiction de fréquenter certains lieux, bracelet électronique…).


L’Assemblée nationale vient de supprimer le rappel à la loi sous prétexte que son recours trop fréquent venait conforter le sentiment d’impunité de certains délinquants et le sentiment d’injustice des victimes. Certes. Mais il vaut mieux un simple rappel à la loi qu’une absence complète de suites judiciaires car ce rappel était une sorte d’avertissement sans frais ayant permis de dissuader de jeunes auteurs de petits délits, de récidiver. On ne peut pas laisser ces « petits délits » sans réponse pénale.


Il faut privilégier les travaux d’intérêt général, contraignants et visibles, et donner à la justice les moyens de les systématiser et de les superviser. On en revient toujours à la question des moyens que la justice n’a pas ! Ce sera l’objet d’une autre chronique sur l’application des peines et la question de la prison.


Le trafic de stupéfiants


« La France demeure le premier pays consommateur de cannabis en Europe. Les politiques semblent impuissants, les policiers sont quotidiennement mis en danger… » Ainsi débutait l’enquête de Marianne (n1262 de mai 2021), à juste titre. Car, malgré tous les efforts de la police, la lutte contre le trafic de cannabis ressemble fort à une gigantesque Bérézina. Il faut donc, là aussi, poser le sujet, et proposer des solutions, loin des « y a qu’à faut qu’on ». et parce qu’il n’y a pas de certitudes, je tenterai de verser quelques réflexions dans une prochaine chronique.

On ne gouverne pas dans l’instant et dans l’émotion mais dans la durée et en responsabilité.

La remise automatique des peines


Il conviendrait par ailleurs de réviser l’article 721 du code de procédure pénale en supprimant le caractère automatique des remises de peine et en excluant de ce dispositif certains crimes et délits d’une particulière gravité.


A chaque drame, une nouvelle loi ! Sans doute, plus de 20 nouvelles lois en 20 ans et combien de réformes du code pénal ? Tout cela ne fonctionne pas. On ne gouverne pas dans l’instant et dans l’émotion mais dans la durée et en responsabilité.


Un magistrat me disait il y a quelques années lorsque j’étais député, « on vient à peine de commencer à appliquer les nouvelles procédures que nous avons déjà une nouvelle loi qui change tout ! » Et pourtant on continue. N’y aurait-il pas là un terrible aveu d’impuissance ou bien le souci pernicieux de masquer le vrai problème de notre perte de souveraineté et donc de notre capacité à décider ?


Il faut en finir avec tout cela. Ajuster notre droit juste là où il le faut et prendre à bras le corps, en revanche, le droit européen.

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